Le début de l’année 2025 a été marqué par une forte activation diplomatique de la Turquie autour de la crise ukrainienne. Parallèlement à diverses déclarations publiques, le 18 février, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a reçu son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky à Ankara, peu de temps après une réunion tendue à la Maison-Blanche. Il est à noter que cette rencontre a eu lieu au même moment que les négociations entre la Russie et les États-Unis à Riyad.
À l’issue de l’entretien, la Turquie a exprimé un soutien ferme à l’Ukraine.
Dans ce contexte, un article publié par Bloomberg le 27 février 2025 a attiré l’attention. Selon des sources bien informées, « la Turquie est ouverte à l’envoi de ses troupes pour participer à une mission de maintien de la paix en Ukraine ». Peu après, la Turquie a pris part au sommet européen organisé le 2 mars à Londres, au cours duquel une telle mission a été discutée. Plusieurs médias, citant une source au ministère turc de la Défense, ont rapporté que la Turquie se disait prête à envoyer des troupes en Ukraine en tant que force de maintien de la paix, si cela s’avérait nécessaire pour rétablir la stabilité et la paix régionales.
Toutefois, aucune déclaration officielle n’a été formulée sur le sujet, ni par les autorités turques, ni dans les bulletins hebdomadaires du ministère de la Défense. Fidèle à sa ligne diplomatique prudente, Ankara évite les initiatives publiques susceptibles d’irriter ses partenaires internationaux. Selon les informations relayées dans la presse, le nombre de soldats envisagés pour une telle mission a d’abord été estimé entre 25 000 et 30 000 hommes, avant d’être ramené à environ 10 000. Ces chiffres laissent penser que l’implication turque pourrait se limiter à une brigade, voire à un bataillon.
La dimension économique de cette stratégie n’est pas négligée. Lors de sa rencontre avec Zelensky, Erdoğan s’est dit prêt à fournir une aide militaire à Kiev en échange de régimes de faveur pour les entreprises turques opérant en Ukraine.
En réponse à la demande de Zelensky concernant l’accès à des armements modernes, Ankara a proposé à l’Ukraine un accès complet aux produits de la filiale locale de Baykar Makina, capable de produire jusqu’à 20 drones par mois. Cette usine, actuellement en phase d’achèvement, pourrait devenir un élément central du soutien militaire turc. En contrepartie, la Turquie réclame des avantages fiscaux significatifs pour ses entreprises, ainsi que la signature de contrats à long terme pour participer à la reconstruction de l’Ukraine.
Ainsi, malgré une volonté affichée de jouer un rôle de médiateur entre Moscou et Kiev, Ankara apparaît de plus en plus comme une partie prenante du conflit, livrant activement des armes et renforçant les capacités de défense de l’Ukraine. Derrière cet engagement, la Turquie cherche aussi à s’implanter durablement sur le marché ukrainien et, par extension, à profiter des flux financiers européens et des avoirs russes gelés affectés à la reconstruction.
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